le recueil des besoins des usagers

Un projet accompagné est toujours un projet réussi.

Nous avons demandé à 3 intervenants différents de témoigner de l’apport d’un accompagnement lors des phases de recueils des besoins des usagers dans le cadre d’un programme de construction ou de rénovation scolaire.

Ils nous parlent de l’importance d’un tiers de confiance neutre qui fait preuve d’écoute, d’empathie pour libérer la parole, des qualités d’observation essentielles à la bonne prise en compte des besoins des usagers. Ce doit être un facilitateur qui questionne le groupe et lui apporte de nouvelles sources d’inspiration pour prendre du recul et se projeter.

Céline Tixier intervient en Assistance à Maîtrise d’Usage et design de service en amont de vos projets de transformation ou de construction d’espace. Pour cela, elle met en place des démarches de concertation permettant une identification précise et pluridisciplinaire des besoins, des usages et des contraintes auprès de tous les utilisateurs du lieu ainsi que des phases d’observation sur site.

« Un projet de transformation des espaces pour lequel il n’y a pas eu de concertation préalable des usagers ni d’explication des pré-requis subira des blocages et de fortes tensions dans sa mise en œuvre.

Lorsque des parents d’élèves n’ayant pas été consultés, voient pour la première fois l’esquisse d’un projet d’établissement dans lequel leur enfant est scolarisé, ils n’y détecteront que des éléments négatifs. Cela entraine alors des échanges parfois houleux lors des réunions publiques de présentation du projet entre les usagers et les élus. Faute de concertation et d’explication des pré-requis, une minorité des usagers fortement opposée au projet peut alors prendre le leadership et engager des actions (courriers officiels adressés aux élus, pétitions, recours, etc.) pouvant engendrer le ralentissement voire le blocage du projet.

un tiers de confiance

Seule l’intervention d’un tiers de confiance permettra d’apaiser les tensions entre les élus et les usagers et de libérer la parole. Le rôle de cette intervention extérieure sera alors de mettre en place différentes démarches de concertation auprès de l’ensemble des usagers afin d’identifier leurs besoins, leurs attentes et leurs craintes pour ensuite élaborer un tout premier cahier des charges fonctionnels à transmettre aux concepteurs (programmistes, architectes, aménageurs). Neutralité, écoute et empathie sont les éléments clés d’une telle intervention en amont des projets autrement dénommée Assistance à Maitrise d’Usage ou encore Design de Service.

la concertation...

La mise en place de démarches de concertation n’est pas chose aisée car elle doit s’adapter à tous les profils d’usagers. Il est en effet différent de s’adresser à un élève d’une école primaire ou à un enseignant. Pour cela, différents outils de concertation peuvent être mis en place afin de recueillir la parole des utilisateurs (entretiens individuels ou collectifs, ateliers participatifs, sessions de prototypages, etc.).

Par ailleurs, la concertation est l’opportunité de faire se rencontrer des usagers de profils différents qui ne se sont jamais parlés auparavant. Un groupe d’usagers composé d’un enseignant, d’un parent d’élève, d’un riverain et d’un membre d’une association culturelle ou sportive locale n’en sera que plus productif ! Chacun pourra exposer ses besoins et ses craintes et voir que cela est parfois partagé par d’autres mais pas de façon systématique et que certaines attentes peuvent être contradictoires. Charge alors au groupe d’usagers de réfléchir ensemble à des solutions consensuelles permettant à chacun d’être « gagnant » à minima.

... entre tous les acteurs

Enfin l’identification de toutes les parties prenantes et utilisateurs du lieu est indispensable avant la mise en place d’une démarche de concertation. Élus, direction académique, référent au numérique, direction d’établissement, personnel de mairie (cantine, périscolaire), enseignants, élèves et parents d’élèves doivent être intégrés à la concertation en tant que parties prenantes et utilisateurs des établissements scolaires. L’établissement scolaire n’est souvent pas isolé mais au contraire intégré dans un environnement qu’il est aussi important de connaitre et de consulter. Riverains, commerçants, associations locales sont aussi des utilisateurs indirects des établissements scolaires qu’il est essentiel d’intégrer aux démarches de concertation dans le cadre d’un projet d’établissement scolaire. »

Eric Wirth est architecte. Il est vice-président du Conseil national de l’Ordre des architectes (Cnoa). Il témoigne de l’écoute et de l’observation, deux qualités essentielles chez un architecte.

L’architecte construit pour l’usager, pas pour son client

Dans un projet, il y a un maître d’ouvrage - celui à qui appartient l’ouvrage – c’est-à-dire le le client ; un maître d’œuvre - celui à qui appartient l’œuvre - l’architecte ; et enfin le maître d’usage, c’est à dire l’occupant, celui qui va utiliser les lieux.

Dans un programme scolaire, l’architecte construit pour les usagers, les élèves, les enseignants, le personnel administratif et technique, les parents d’élèves et visiteurs.
En fonction du projet, il reçoit une commande de la commune ou de la communauté de communes pour une école, du département pour un collège et de la région pour un lycée. Ces commanditaires assurent la maîtrise d’ouvrage du projet, mais n’en seront pas les futurs utilisateurs.

L’objectif de l’architecte est l’épanouissement de toutes les personnes qui vont vivre les lieux qu’il a conçus, celles qui vont y écrire leur histoire, personnelle et collective, y mûrir, y grandir.

Au-delà du programme technique qui constitue le cahier des charges quantitatif et qualitatif de sa commande, l’architecte ne doit jamais se passer du contact direct avec les futurs usagers. Il doit les écouter, les observer. Il doit (re)devenir élève, devenir enseignant ou principal, pour comprendre les usages et les pratiques pédagogiques, et produire du sens dans chacun de ses choix conceptuels.

Personnellement, j’ai toujours milité dans mes projets pour la constitution d’un groupe de pilotage qui associe maîtrise d’œuvre, décideurs et usagers, de la programmation jusqu’à la mise en service du bâtiment, afin de co-construire le projet pour une appropriation aisée par tous.

En veillant cependant à faire le tri entre envies individuelles et besoins collectifs, car la conception de l’école doit être adaptée à chaque nouvel usager, élève, enseignant ou personnel administratif, tout en étant évolutive.

Le projet d’architecture n’est jamais un acte isolé. Il se nourrit du contexte, des contraintes, et surtout des usages qu’il doit servir.

Un projet partagé est toujours un projet réussi.

Anne-Cécile Calléjon est médiatrice numérique à l’atelier Canopé de Vesoul. Elle définit son rôle autour de la notion d’accompagnement, de faire des choses qui apportent aux autres, de développer des compétences numériques mais pas seulement.

Comment accompagner les enseignants dans le changement ?

Difficile pour une équipe, un enseignant de se lancer seul dans la modification de ses méthodes pédagogiques et dans l’aménagement des espaces qui en découle.

Afin de gagner du temps et de l’énergie, il est préférable de se faire accompagner par une personne extérieure à la structure qui va faciliter. Mais comment cette médiation se dessine-t-elle ?

Cet accompagnement autour de la forme scolaire ne peut s’envisager selon un seul modèle.

Il n’existe pas « une bonne solution ». Pour que l’accompagnement soit efficace et durable, il faut une personne experte de la méthode et une équipe garante du contenu et du contexte.

L’image du joueur de curling est intéressante pour visualiser le processus.
L’équipe lance la pierre vers un objectif et son facilitateur balaie la zone pour que cette dernière atteigne son objectif. À aucun moment, il ne la touche.
L’équipe est-elle seule porteuse du projet.

Son rôle est de mettre en place des ateliers de réflexions structurants pour garantir un cadre sécurisant des échanges. Ces méthodes apporteront un cadre propice à développer les échanges et tout le potentiel créatif des participants. Le groupe peut ainsi se nourrir de pratiques et d’outils qu’il peut retransposer avec ses apprenants. Le facilitateur permet ainsi au groupe d’ouvrir de nouveaux horizons pédagogiques et méthodologiques. Les participants vivent en immersion totale une méthode d’enseignement. Il est important de faire comprendre aux enseignants qu’ils ont tout le potentiel pour réaliser de grands projets et que le rôle de facilitateur est de leur simplifier la vie.

Autre élément important, il est là pour accompagner le développement de l’intelligence collective au service d’une vision commune et également sa mise en œuvre par l’équipe au sein de l’établissement.

C’est par le questionnement du groupe, par l’ouverture vers d’autres pistes, par l’apport de nouvelles sources d’inspiration que le facilitateur va pousser le groupe à se dépasser, à prendre du recul et à se projeter plus loin. Il est présent pour identifier les leviers, les faiblesses du projet et apporter un regard extérieur sur le fonctionnement du groupe.

Pour conclure, ce facilitateur présent durant toutes les étapes du projet (avant, pendant, après) offre une réelle sécurité aux enseignants en quête de développement professionnel. Il est important de proposer aux équipes qui le souhaitent ce type d’accompagnement.